Imédi TV : de rebondissements en «révélations»

Publié le par sophie tournon

CAUCAZ.COM
Dépêche publiée le 16/03/2010


Par Sophie Tournon. Sources : Civil Georgia, copoka.net, Georgia Times



Les fausses informations du 13 mars diffusées par la chaîne privée Imedi, cataloguée progouvernementale, suscitent une kyrielle de rebondissements et de réactions.

Côté géorgien, l’opposition, le Patriarche, des acteurs de la société civile, dont l’Association des jeunes juristes, dénoncent l’absence de responsabilité des journalistes et des dirigeants de la chaîne. Le directeur général d’Imedi maintient que l’émission était réaliste, la seule erreur ayant été l’absence de bandeau permanent prévenant les spectateurs du montage présenté comme un vrai journal télévisé. Enfin, le président Saakachvili assure que l’émission était de salubrité publique, car elle permettait de pointer les véritables traîtres à la patrie géorgienne, les leaders de l’opposition qui collaborent avec la Russie.

Côté communauté internationale, l’ambassadeur états-unien a fait savoir qu’il jugeait l’émission irresponsable et très éloignée des standards attendus de la part des journalistes géorgiens. La représentante de l’OSCE pour la liberté des médias Dunya Miatovich, de la Bosnie Herzégovine, déplore l’absence de principes et d’autorégulation de la part des journalistes géorgiens de la chaîne. L’ambassadeur de la Grande Bretagne a lui jugé déplacé l’utilisation d’images d’archives le mettant en scène ainsi que le Premier ministre britannique. Enfin, l’EUMM (Mission d’observation de l’Union européenne) souligne que de telles déclarations ne peuvent qu’envenimer les relations russo-osséto-géorgiennes à la frontière entre la Géorgie et l’Ossétie du Sud indépendante de facto. En Russie, les réactions sont unanimes : selon le ministère des Affaires étrangères, cette émission prévoyant une invasion de la Géorgie par la Russie est une provocation de plus.

Mais «l’affaire Imedi» ne s’arrête pas à ces réactions. Le 15 mars, un internaute a mis en ligne deux dialogues enregistrés au téléphone. Dans le premier, les interlocuteurs sont présentés comme étant le directeur d’Imedi et son adjointe. Ce premier balaye les inquiétudes de la seconde sur l’impact que pourrait avoir l’émission si aucun bandeau explicite ne venait prévenir du caractère fabriqué de l’émission. L’homme y affirme avoir reçu l’aval du Président pour que l’émission soit émise telle quelle. Le directeur d’Imédi Guiorgui Arveladzé confirme reconnaître sa voix mais dénonce un montage audio. Ce dialogue comme le second mis en ligne peu après, supposément entre le président Saakachvili et le ministre géorgien de la Culture, sont en cours d’authentification.

Certains voient en eux le produit du FSB (services spéciaux russes) destinés à dénigrer le Président géorgien. En effet, ce dernier est accusé par l’opposition géorgienne d’être derrière cette émission à l’origine d’une vague de panique en Géorgie. Divers facteurs viennent étayer cette thèse : les liens entre le directeur d’Imedi et le Président, la ligne éditoriale de la chaîne, et le ton de l’émission incriminée. Rappelons que les fausses informations du 13 mars faisaient non seulement des Russes les envahisseurs de la Géorgie, mais surtout stigmatisaient deux leaders de l’opposition, Nino Bourdjanadzé et Zourab Noghaïdéli, qui se sont récemment rapprochés du Kremlin, devenant au yeux de nombreux Géorgiens des traîtres à la patrie.

D’autres estiment au contraire que le ministre de l’Intérieur Vano Mérabichvili, supposé détenir un pouvoir exceptionnel en Géorgie, est à l’origine de ces «fuites». Son but, selon l’expert Irakli Sessiachvili, serait de rappeler au Président son «pouvoir», en vue de placer sa candidature lors des prochaines présidentielles prévues en 2013. En un mot : l’«affaire Imedi» et ses supposées «révélations» n’est pas prête de s’arrêter…

Publié dans Politique intérieure

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